samedi 26 mars 2011

Monument dressé en plein océan à la gloire du vent

Que je sois heureux ou que je sois triste, je le suis, toujours seul. Même le monde a cette subite propension à vouloir se distancier de moi. Je viens alors m'assoir près de lui et demande: es tu bien calé à présent?

lundi 21 mars 2011

Les Trois cheveux magnétiques de la belle blonde attirent les papillons

Tout est lié. Je ne sais depuis quand cet état de fait se manifeste à moi. Sans doute depuis cet âge métaphysique où le réel est saisie par interprétations fantaisistes et que rien ne fait écran entre soit et les questions de la vie et de la mort.

Un état de fait qui laisse à penser l'existence d'un possible destin, d'un cheminement aiguillé: peut-être le fil de cette chère Ariane?

Quand une chose apparaît et réapparait sous des formes variées, s'agissant aussi bien de celle du figuré que du figurant, plusieurs fois dans le temps. Lorsqu'un détail des plus anodins peut en l'espace d'un instant transfigurer le paysage de vos pensées pour y prendre une place redondante, quoi que plutôt rebondissante. Rebondissant, c'est bien le mot. Une idée s'échappe puis resurgit, comme un ricochet à la surface de l'eau, rebondit sur la "forme" pour en prendre une autre.


Une rencontre, imprévue: de femmes à l'oiseau
_ Miro. Sculpteur fantasmagorique méconnu. Explosion de l'atome dans la joie. Un monde où la femme est un univers à part entier, un espace d'infinie liberté. Tout comme l'oiseau. "L'oiseau fait penser à l'espace". Un espace immense, source intarissable d'inspiration. Telle une montagne sacrée se dévoilant au petit matin de sa brume ouatée, la féminité dans l'œuvre de Miro se dérobe et s'exacerbe . Une ode sensuelle à la déesse sculptée.
_ l'étrange affaire Angelica. Une femme morte, photographiée et aimée. Profondément ébaubi par sa beauté qui reprend vie, le protagoniste, photographiant bêcheurs et saintes trinités, cherche en vain à la retrouver. Pour cela, il faudrait que son âme puisse s'élever, s'envoler vers l'étreinte qui lui est proposée, que l'âme quitte le corps, bastion de la matérialité. S'évader, être aussi libre qu'un petit moineau, oiseau témoin de la présence fantomatique de celle qu'il chérit tant. Si celui-ci venait à mourir, c'est forcement que la rédemption d'Angelica-de n'avoir pu être à ses côtés-viendra de se terminer: elle l'aura donc abandonné au monde des corps pour rejoindre celui des âmes et de la douceur bleuté de la mort. Choisira-t-il de la rejoindre? L'oiseau prendra-t-il son envol?
_ Le Corbeau d'Edgar Poe. Intrus inattendu dont la ritournelle laconique vient marteler la logorrhée désespérée de l'amant délaissé par sa bien-aimé. La métaphore de l'inébranlable désemparement qui vous saisit quand la présence de l'être aimé devient absence à jamais. Solennel, lui, le corbeau n'est pas près de le quitter. Noirceur infinie témoin du deuil inachevé.Trois femmes, un oiseau. Celui de l'espace, de l'envol, de la mort et du deuil de l'être aimé: d'une âme vagabondant entre vie et mort. Situations rétroactives, le futur grammatical de la nostalgie. Une liaison "qui projette un passé éploré dans un lointain avenir, qui transforme l'évocation mélancolique de ce qui n'est plus en la tristesse déchirante d'une promesse irréalisable" (Une Rencontre, Milan Kundera)Oui, là est sans doute l'explication de cette inexplicable liaison.



mardi 15 mars 2011

Femmes du Caire

Des tomates sur un corps de femme, tout ce que la chaire contient de charnelle. Sur une table, l’une tombe. Mais jamais ne se redressera. Vu de près, la peau est lisse, bombée, fraîche et éclatante de vitalité. Sans doute trop, hélas. Car de là viendra la blessure, la fourchette plus encore que le couteau, saccagera le fruit dont la fertilité se trouvera anéanti. Seul restera le scintillement de l’inox, inoxydable, regorgeant de superbe. Quelle autre finalité aurait donc pu avoir une tomate ? Son dessein n’est-il pas de finir découpé et mangé ?Quelle sacrilège d'abandonner un si bon fruit à la putréfaction de fin d'une vie! Une putréfaction qui, dans tous les cas, viendra de l’intérieur.
Ravissante métaphore qui ouvre ce film : une ode à la pugnacité de femmes vivant sous le gouge de la loi de l’islam. Des femmes dont la condition est entièrement dépendant de celle de l’homme. D’un homme. Auquel il leur faudra se marier. Le mariage est un contrat. Comme tout contrat, on discute des conditions avant sa signature. La liste des sacrifices est longue. Et moi, en échange, que recevrai-je, s'enquiert la femme ? L’homme lui répond d'un pincement des lèvres: un mari, oui un unique mari. Que voudrais tu de plus ? Tu es cinglé ma parole!
A travers quelques exemples, bien choisis, souvent violents, toujours extrêmes, le film dresse ici un portrait poignant de la condition de la femme dans les pays musulmans où la pression tant sociale que morale imprègne toutes les consciences. Il faut dire que les femmes elles-mêmes s’infligent un sorte insidieusement inculpé depuis leur tendre (ou pas) enfance, avant même qu’elles ne sachent parler. On leur a appris à se punir elles-mêmes. Et même cela, l’homme n’aura plus besoin de le faire.
Trois gouttes de sang sur un drap, une femme a perdu sa virginité contre son honneur, et le rouge de l’éclat des tomates meurtries.



Il se pose alors l'abstruse question de la contraception. Pourquoi la femme devrait elle être seule à la subir? à s’empoisonner une vie entière avec une pilule dont l’innocuité n’a jamais été prouvée ? Ne s’agit il donc pas là du meilleur exemple de perturbateur endocrinien, celui-là même tant récrié par les experts toxicologues ? S’en passerait-elle au prix de la permanente angoisse de tomber enceinte ? Se faire greffer un stérilet, corps étranger pour lequel elle devra ingurgité quantité d’immunosuppresseurs. Charmante alternative. Et l’homme, lui, resta ou plutôt se donnera le droit de rester à côté de la question. Bien que vivant en pays émancipés, cette inégalité illégitime dans les faits est trop profondément enracinée dans notre société. Qui osera la contester?

jeudi 10 mars 2011

sweet art, street art (ou faire la différence entre odeur et odorité)

C'est une question de perception.

Le quai d'une gare le matin à l'aube, atmosphère ouatée et froid glacé, cependant que le temps comme suspendu à la ligne ferroviaire s'étire de tout son long. Les lampadaires, encore allumés, seuls témoins des ténèbres de la nuit, épient par le truchement de leurs yeux torves la sinusoïdale des rails fuyant le ciel apeuré. Toi, tu restes éblouie d'une lumière qui brûle les yeux: c'est pire que le soleil.

Une rampe d'escalier, deux pigeons. Madame et Monsieur paradent fièrement. On pourrait même croire qu'ils se tiennent la main. Dodelinant alternativement la tête d'avant en arrière, le tempo est donné. Une marche après l'autre de leurs petites pattes musclées, ils cheminent d'un pas prompt et déterminé. D'en bas, par intermittence, apparition d'une de leur tête: Monsieur avait pourtant bien dit à Madame qu'il fallait jouer la discrétion!

Evol's Building



La façade d'un HLM, l'utopie d'un carton ramassé dans la rue, magnifié de toutes ses blessures, et dont la customisation ferait apparaître fenêtres, antennes et balcons. D'autant plus que personne ne le voulait, ce carton. Reflet et témoin d'un quartier en perdition . Evol n'aurait pas fait mieux.

Ne peut on appréhender le monde et sa beauté autrement que d'un regard distancié dont l'art seul a été capable de nous procurer?

Détachée.





Peut-être est ce là une évolution logique. Un refus de passivité: l'aspect contemplatif ne suffirait plus. L'œuvre veut être vécue, ressentie versus sentie, un élan de participation à son processus de création vers un besoin d'interaction. Aujourd'hui, le corps doit s'affirmer. Preuve d'une existence trop souvent bafouée par l'autocratie de l'intellect.

mardi 1 mars 2011

Un été suédois

solo come un cane

Jamais la naïveté n'aura incarné avec autant de finesse le sens premier de sa signification. Naïveté, une grâce ingénue, une sensibilité à fleur de peau, caresse de souplesse.

Une envie de champs emplis de blé se balançant au gré du vent, de chaleur sur la peau, une odeur de soleil dans les vêtements, de robe à fleur et de chasse aux crapauds.

Puis il y a ce visage, rond, d'une blancheur immaculée parsemé de tâche de rousseur. Un parterre de coquelicots. Deux yeux apparaissent, noisettes de bleues, sourcils détachés, presque effacés. Enfin, les cheveux or vénitien, rideaux d'une âme timorée secrètement cachée. Tels des roseaux au bord de l'eau, ils protègent et trompent l'inconnu .

Les yeux regardent le monde, l'embrassent et l'étreignent. Il y a des sentiments, si puissants soient ils, qui ne pourront être cités, qui se contenteront juste d'être enveloppés, enveloppés par un regard, ce regard dont la force ardue les fixera, attachés par d'invisibles lianes. Petit à petit, celles-ci seront sollicitées, écorchées voir brisées de toutes les sottises de la vie.

Des bouts de papiers, bribes de souvenirs, d'envie, de désirs. Des punaises sur un tableau de liège les retiennent. Ils seront retirés, de gré ou de force. Après tout, ne sommes nous pas de simples sachets de thé qu'une eau bouillante viendra infuser?