C'est une question de perception.
Le quai d'une gare le matin à l'aube, atmosphère ouatée et froid glacé, cependant que le temps comme suspendu à la ligne ferroviaire s'étire de tout son long. Les lampadaires, encore allumés, seuls témoins des ténèbres de la nuit, épient par le truchement de leurs yeux torves la sinusoïdale des rails fuyant le ciel apeuré. Toi, tu restes éblouie d'une lumière qui brûle les yeux: c'est pire que le soleil.
Une rampe d'escalier, deux pigeons. Madame et Monsieur paradent fièrement. On pourrait même croire qu'ils se tiennent la main. Dodelinant alternativement la tête d'avant en arrière, le tempo est donné. Une marche après l'autre de leurs petites pattes musclées, ils cheminent d'un pas prompt et déterminé. D'en bas, par intermittence, apparition d'une de leur tête: Monsieur avait pourtant bien dit à Madame qu'il fallait jouer la discrétion!
Evol's Building |
La façade d'un HLM, l'utopie d'un carton ramassé dans la rue, magnifié de toutes ses blessures, et dont la customisation ferait apparaître fenêtres, antennes et balcons. D'autant plus que personne ne le voulait, ce carton. Reflet et témoin d'un quartier en perdition . Evol n'aurait pas fait mieux.
Ne peut on appréhender le monde et sa beauté autrement que d'un regard distancié dont l'art seul a été capable de nous procurer?
Détachée.
Peut-être est ce là une évolution logique. Un refus de passivité: l'aspect contemplatif ne suffirait plus. L'œuvre veut être vécue, ressentie versus sentie, un élan de participation à son processus de création vers un besoin d'interaction. Aujourd'hui, le corps doit s'affirmer. Preuve d'une existence trop souvent bafouée par l'autocratie de l'intellect.
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